Il y a quelque chose de vraiment spécial à rouler de nuit à vélo.
Mais il y a aussi beaucoup, beaucoup de critiques sur le sujet.
Les risques avec les voitures, les risques de s’endormir, la mauvaise gestion du sommeil, les difficultés pour se repérer…
« L’inutilité » de ces sorties pour ceux qui ne pratiquent pas l’ultra.
Et puis il y a l’inévitable :
« Rouler de nuit, c’est pas dangereux pour une fille ? »
Et pourtant…
J’ai traversé le désert australien de jour et de nuit, roulé de nuit sur des routes allant des petits chemins de gravel à l’autoroute, en France et à l’étranger. J’ai roulé pendant 24 heures, 36 heures sans dormir. J’ai vu des changements de température passant de 40 °C le jour à 5 °C la nuit.
J’ai vécu les hallucinations et les moments si doux qu’on en oublie le temps.
Je crois honnêtement avoir eu toutes les réactions possibles et imaginables lorsque je parle de rouler de nuit à vélo. Tout est compilé juste ici.
Alors j’ai voulu en finir une fois pour toute avec ces critiques, ces remarques, ces incompréhensions. Et je vais essayer de t’expliquer ici le pourquoi et le comment de ce monde merveilleux. 🙂

SOMMAIRE
1. Pourquoi rouler de nuit à vélo ?
Rouler de nuit : un véritable défi mental
Rouler de nuit est difficile sur tous les plans. Mentalement, c’est un tout autre niveau de difficulté et de barrières à dépasser. Ton corps ne cesse de se demander pourquoi tu es en train de pédaler quand tu devrais être dans ton lit. La fatigue apparaît toutes les heures. Et puis, tu te sens tellement seul(e).
Surtout au coucher du soleil. C’est peut-être bien le pire moment. Tu es seul(e) sur ton vélo, à te demander ce que tu fais ici, à regarder le monde s’endormir tout en sachant que tu ne fais que commencer ta sortie. Tu réalises que tu en as encore pour 8 heures de route et l’expression « être enveloppée par la nuit » prend tout son sens.
Rouler de nuit, c’est difficile.
Pourtant, ce sont aussi les sorties que je chéris par-dessus tout. Le soleil se couche et plus rien n’a d’importance hormis toi, ton vélo et ton faisceau lumineux. Le trafic ralentis, voire disparaît. Plus aucune distraction n’existe puisqu’on ne voit plus rien, tout autour de toi disparaît dans l’obscurité. Tu éteins ton cerveau et te concentre sur la ligne blanche sur le bitume. Les étoiles arrivent, et avec un peu de chance la pleine lune éclaire ta route.
Il y a un tel sentiment d’apaisement à voir la ligne blanche défiler sous tes yeux et les étoiles tourner au-dessus de toi au fur et à mesure de la nuit, à ne pas voir plus loin que les 20 prochains mètres et perdre complètement la notion de temps.
Rouler de nuit, c’est difficile à expliquer.
Rouler pendant 24 heures
Il y a encore mieux : enchaîner jour et nuit. Rouler pendant 24 heures d’affilée.
Celles-ci, ce sont mes sorties préférées. Sans hésitation. À quelle autre moment dans ta vie tu as l’occasion de voir le soleil faire le tour complet de la terre ? Quelle est la dernière fois que tu as dédié 24 heures de ton temps à une seule activité ? Le sentiment d’accomplissement lorsque tu vois enfin le soleil se lever après une nuit entière à rouler et 24 heures de vélo dans les jambes… C’est indescriptible.
Le dépassement de soi avec un grand D. Le moment où tu t’aperçois que tu as été plus fort(e) que la nuit, que tu as repoussé toutes tes limites. Arriver à destination avec l’impression de tenir le monde entre tes mains.
Souvent je dis que rouler de nuit ouvre des portes dans mon cerveau dont je ne connaissais même pas l’existence. Et c’est vrai.
J’ai l’impression que chaque nuit passée sur mon vélo me donne accès à des parties de moi que je n’avais encore jamais vu. Tu passes la nuit à fixer le faisceau de ta lampe sur le sol, complètement déconnecté(e) du monde réel… Mais en réalité, tu n’as jamais été aussi présent(e).
2. Comment rouler de nuit à vélo [guide complet]
Planifier ton parcours
Pour ta première sortie de nuit, choisis évidemment un parcours que tu connais. De toute façon, tu ne verras rien, donc peu importe les paysages. Choisis simplement un tracé qui t’est familier, tu peux même rester proche de la ville si cela te rassure. Essaye quand même de ne pas rester dans le centre-ville. Le but, c’est de te familiariser avec l’obscurité à vélo et le manque de lumière, donc si possible sans lampadaires.
Tu as plus de chance de te perdre de nuit. Télécharge donc ton tracé (sur ton téléphone, ton Garmin…) pour pouvoir t’orienter sans problème. Même si tu connais la route, tu pourrais être dérouté(e) puisque tu ne l’as jamais vu sous cet angle ci !
Choisis également une nuit d’été pour commencer, sans pluie ni trop de vent (généralement il est plus faible la nuit). Les nuits d’été sont plus agréable que les journées d’été pour rouler, puisque les températures sont vraiment douces et tu n’as pas de risques de coups de soleil ! Essaye aussi de choisir une nuit de pleine lune, tu seras étonnée de voir à quel point elle peut t’éclairer. J’ai le souvenir de certaines sorties où j’éteignais ma lampe pendant quelques minutes et je roulais seulement à la lumière de la lune. C’était vraiment magique.
Choisir ton éclairage
L’éclairage est la partie la plus importante de ton matériel, tant pour voir que pour être vu(e). Il existe un grand débat entre lampe dynamo et lampe rechargeable, et je te donne mon avis en détails sur le sujet dans mon article sur le matériel de bikepacking.
Pour résumer, je pense sincèrement que la lampe dynamo est la plus adaptée pour rouler de nuit. Elle n’a pas de limite de temps puisque tu la fais fonctionner, au contraire des lampes rechargeables qui ne durent que quelques heures avant de devoir être rechargée. La dynamo est plus chère (notamment le moyeu) mais l’investissement vaut vraiment le coup si tu comptes faire des sorties de nuit. Je recommande vivement le modèle Busch & Müller (160 €) que j’utilise depuis 2 ans et qui est comme neuf. Son faisceau est similaire à celui d’une voiture, ce qui n’est vraiment pas négligeable.
La lampe rechargeable te sera cependant indispensable aussi, mais pour être vu(e). Deux lampes à l’arrière, et une troisième au cas où l’une d’entre elles lâcherait. Tu peux en trouver des tas sur internet, je conseille en général d’en prendre une à piles car tu peux facilement changer les piles au milieu de la nuit (au lieu de devoir t’arrêter une heure pour recharger une lampe à batteries).
Voir et être vu(e)
Être vu(e) est tout aussi important ! Pour rouler de nuit à vélo, j’utilise aussi du scotch réfléchissant. On en trouve facilement sur internet ou dans des magasins comme Brico Dépôt. Si je ne devais garder qu’un moyen d’être vu(e), ce serait ce scotch (plutôt que les lampes arrière). Comme tu peux le voir sur la photo en dessous, c’est vraiment un super moyen d’être visible pour les voitures. Tu peux en mettre autant que tu veux sur ton vélo, en général j’en mets sur l’arrière des pédales, les haubans, la tige de selle, la sacoche de selle, les côtés de la fourche et parfois les jantes.
Cela va sans dire mais porte également des vêtements voyants et réfléchissants. Bien que le jaune fluorescent soit recommandée en journée, la nuit, c’est plutôt le vert qui se voit le mieux. Pour la petite histoire, c’est dû au fait que nos yeux utilisent à la fois des cônes et des bâtonnets pour voir les couleurs ; les cônes sont sensibles aux couleurs, et les bâtonnets ne le sont pas. La nuit, nous utilisons principalement les bâtonnets ; nous avons du mal à distinguer les couleurs (notamment le rouge), hormis le vert qui continue de faire effet. Donc, porte du vert et des vêtements qui reflètent la lumière (pas de couleurs).
Si tu veux plus de détails sur cette histoire de couleurs la nuit, il y a un bon article dessus (en anglais) !


Gérer le trafic
Je sais que c’est quelque chose qui effraie beaucoup de cyclistes lorsqu’il s’agit de rouler de nuit. C’est moi-même ma seule crainte parce que je sais que les voitures ne s’attendent pas à voir un vélo, de nuit, sur la route. En journée, elles ne font pas déjà pas tellement attention, et de nuit, c’est presque pire. Garde donc toujours en tête que les voitures ne s’attendent pas à te voir et sois attentif à la moindre voiture qui arrive.
Le scotch réfléchissant m’a beaucoup aidé parce que je sais que je suis (extrêmement) visible à tout moment, contrairement aux cyclistes qui n’utilisent qu’une lampe clignotante à l’arrière. Je te conseille donc vraiment d’en mettre sur ton vélo (même si je sais que ce n’est pas très glam). J’ai observé une différence très nette dans le comportement des voitures depuis que j’en utilise : elles s’écartent bien plus tôt pour me doubler et me laissent bien plus d’espaces.
Monter et descendre des côtes la nuit
Les rôles s’inversent. La nuit, grimper une côte de nuit est étonnamment plaisant ! Il y a un véritable effet d’optique qui opère : on ne voit que le sol à quelques mètres devant nous et on appréhende beaucoup moins que lorsque l’on peut voir toute la distance qu’il nous reste à monter. J’ai vérifié cela de jour, en grimpant une côte en ne regardant que quelques mètres devant moi, et ça marche ahah. Ton cerveau est de la pâte à modeler, je te l’avais dit…
En revanche, descendre une côte est bien moins amusant. Déjà, parce que le manque de visibilité t’oblige à ralentir, au cas où un animal surgit, un bout de bois se trouve en travers de la route ou si la route est de mauvaise qualité. Et puis aussi parce que les températures baissent franchement la nuit, et que le froid soudain en descente rapide est vraiment désagréable. Toutes ces raisons font que descendre une côte de nuit à vélo est très différent d’une descente en journée !
Les vêtements et températures de nuit
Comme je disais juste au-dessus, les températures baissent vraiment la nuit. Même s’il ne fait pas « froid » à proprement parler, le changement de température va surprendre ton corps. Le moment le plus froid est d’ailleurs 1 ou 2 heures avant le lever du soleil (il y a aussi une explication scientifique mais je te laisse faire tes recherches cette fois-ci 😉 ).
Emmène donc une petite doudoune (celles que l’on peut plier en tout petit) pour porter en début de nuit (le temps que ton corps s’habitue aux nouvelles températures) et dès que tu auras froid. Autrement, emporte aussi des manchettes et des jambes, ou des genouillères. C’est important de garder tes genoux au chaud, étant l’articulation la plus utilisée. Autrement, ils refroidissent à chaque pause que tu fais et tu auras l’impression d’avoir les genoux rouillés en redémarrant ahah.
La gestion de la nourriture
J’ai écrit un article complet sur la nutrition et l’hydratation en ultra. Pour ce qui est des sorties de nuit, il est très important de planifier en avance. En journée, ton corps « sait » quand il faut manger, puisqu’il est habitué à avoir des horaires assez fixes. La nuit, il est déboussolé et tu dois souvent te rappeler de manger et boire. Surtout avec le froid, tu as beaucoup moins soif et cela peut être très trompeur. La stratégie, c’est de manger et boire à intervalles réguliers, même si tu n’as pas faim. Je le fais en général toutes les heures et c’est un rythme qui marche bien pour moi !
Autre chose, tu dois aussi prendre en compte le fait que la plupart des commerces seront fermés à 1 heure du matin. Prévois donc d’acheter à manger avant 19h-20h, dans la dernière ville que tu traverseras avant la nuit, pour ne pas être coincé une fois que tout sera fermé. Emporte suffisamment de nourriture pour tenir jusqu’au matin, donc une bonne dizaine d’heures. Tu auras peut-être quelques stations services ouvertes, mais bien souvent elles ne proposent que de l’essence et la partie restaurant est fermée la nuit.

3. La gestion du sommeil en ultra-endurance
Les risques à vélo la nuit
Le danger des autres
Lorsque je parle de sorties à vélo la nuit, on me demande souvent si je n’ai pas peur des animaux. La vérité, c’est que les humains m’effraient bien plus que les animaux. Surtout en tant que femme, puisque l’on nous rentre dans le crâne que tout est potentiellement dangereux. Il y a donc quelques règles simples à suivre en roulant de nuit. Elles s’adressent particulièrement aux femmes, mais aussi aux hommes évidemment.
D’abord, reste toujours très attentive dès qu’une voiture s’approche. Si tu écoutes de la musique, mets en pause et reste alerte. Peut-être que je suis trop parano, mais j’ai entendu trop d’histoires de femmes à vélo ou à moto, percutées volontairement la nuit.
De la même manière, si une voiture s’arrête et te propose de te prendre en stop, n’accepte JAMAIS. En stop, tu ne dois accepter que les voitures qui s’arrêtent parce que tu t’es mis au bord de la route avec le pouce en l’air ; PAS les voitures qui te voient rouler et te proposent de t’emmener. Et de manière générale, évite vraiment le stop la nuit.
Si tu vois au loin une situation « étrange », par exemple une voiture arrêtée au bord de la route, des personnes sur la route… Honnêtement, je fais demi-tour, ou au moins j’attends qu’ils repartent. Si je m’aperçois qu’une voiture me suit, je me tiens prête à sauter du vélo et à partir hors de la route. C’est dans ces situations-là qu’il est vraiment utile d’avoir un petit couteau de poche ou une bombe à poivre.
S’endormir sur le vélo
Évidemment, c’est un gros risque en sortie de nuit. Cela m’est arrivé 2 ou 3 fois et je ne recommande pas l’expérience. Je me suis littéralement endormie quelques secondes avant de me « réveiller » en sursaut. Ces phases d’endormissement sont à prendre très au sérieux et il faut absolument te reposer si elles surviennent. Aucune course, aucun objectif n’est assez important pour t’interdire de te reposer si tu en arrives au point de t’endormir en pédalant.
Percuter un animal sauvage (ou autre chose)
La baisse d’attention et la fatigue peuvent t’amener à avoir un accident. La nuit, tu risques de surtout voir des animaux sauvages traverser la route et comme en voiture, tu risques d’en percuter un. Le soucis, c’est que les dégâts seraient bien plus important que si tu le percutais en voiture. Il est donc d’autant plus important de rester éveillé(e) et alerte.
Ici je ne parle que des animaux que l’on voit sur les routes : biches, sangliers… Si tu pars de nuit sur les chemins, en VTT, suivant le lieu tu peux avoir d’autres animaux à prendre en compte (je pense par exemple aux ours aux États-Unis).
Les hallucinations
Les hallucinations sont quasi inévitables lorsque l’on reste éveillé aussi longtemps et que l’on subit un effort très long. L’idée est d’apprendre à gérer ces moments plutôt que d’essayer de les éviter. Ces hallucinations sont temporaires et souvent courtes. J’essaye d’en rire et d’en « profiter » lorsqu’elles arrivent, et je sais que ce sera une drôle d’histoire à raconter. Elles peuvent être impressionnantes les premières fois, je me rappelle une nuit en montagne où j’écoutais la bande son du « Dernier les Mohicans » (oui je sais ahah) et au détour d’un tournant, j’ai commencé à voir sur le flanc de la montagne des visages sioux et des ombres danser au rythme de Trevor Jones… Un drôle de souvenirs ahah.

Gérer le manque de sommeil à vélo la nuit
Tu seras fatigué(e) quoi qu’il arrive. Il faut donc apprendre à gérer ce manque. Il faut savoir que le sommeil est aussi en grande partie « mental » ; ton cerveau sait qu’il doit dormir à telle heure, et il t’enverra des signaux à cette heure-ci. Tu peux les ignorer et ils disparaîtront au bout d’un moment. Une stratégie est de boire du café ou des boissons énergétiques, à intervalles réguliers. Suivant ta consommation quotidienne, tu auras besoin d’une plus ou moins grande dose lors de tes sorties nocturnes.
Certains cyclistes utilisent aussi des gélules de caféine, ou des pilules qui maintiennent éveillées, comme les pilules NoDoz par exemple. Cependant, je ne recommande pas l’utilisation de médicaments pour rester éveillée (il y a une raison pour laquelle la conduite est interdite avec la plupart des médicaments). Les cyclistes qui le font sont expérimentés.
Personnellement, j’aime beaucoup écouter de la musique en roulant, de nuit comme de jour. Ça me maintient éveillée et ça m’aide énormément à me concentrer. Je sais que certains pensent que c’est dangereux. J’utilise un rétroviseur, donc je vois constamment si une voiture arrive derrière moi, surtout la nuit puisque ses phares se reflètent directement dans mon rétroviseur. Je ne crois pas qu’il soit essentiel d’entendre les voitures, mais plutôt de les voir (après tout, un sourd peut faire du vélo, mais un aveugle aura plus de mal). Si tu te sens à l’aise et si ça t’aide, fais-le avec prudence !
Les stratégie pour dormir en course d’ultra
Il faut trouver la stratégie qui te convient. Personnellement, je sais que je peux partir le matin vers 7h et pédaler 20-21 heures sans trop de soucis, donc jusqu’à 3 ou 4 heures du matin (lendemain). Je sais que je dois me rappeler de boire à la tombée de la nuit, et que je ressens un endormissement vers 22 heures. Et je sais que passées les 21 heures de vélo, je me retrouve face au fameux mur. Il apparaît souvent juste avant le lever du soleil, j’ai le sentiment que je n’arriverai jamais au bout, je me sens terriblement seule, j’ai envie de tout arrêter et de faire du stop pour rentrer. Mais je sais aussi qu’une fois que je verrai le soleil… Tout ira mieux de nouveau, et j’aurai l’impression d’avoir tout juste démarré.
Stratégie #1 : ne pas dormir
Cette stratégie de sommeil s’applique surtout aux sorties et courses de 24 heures à 48 heures. Certains ultra cyclistes l’utilisent aussi sur des périodes plus longues, sur des courses de 1000 km par exemple. C’est un réel effort mental, et il faut aussi connaître son corps sur le bout des doigts. Il faut savoir ce qu’il peut endurer, au bout de combien de temps il craque, ce que tu dois faire pour passer le « mur »… C’est une stratégie qui peut s’avérer dangereuse si tu te lances sans savoir de quoi tu es capable, car tu peux t’endormir à tout moment sur ton vélo.
C’est très psychologique ; ton corps pense que : nuit = dormir, jour = éveillé. Donc, voir le soleil va le « réveiller ». C’est cette connaissance de mon corps et de mon mental qui me permet de tenir 24 heures sur un vélo et de passer ces étapes mentales dans la nuit. Tu peux aussi t’aider à passer ces caps avec du café ou des boissons énergisantes, mais j’essaye en général de n’en consommer qu’en cas de nécessité, puisqu’elles augmentent la fréquence cardiaque (et en endurance, on veut un cœur leeeeeent).
Pour une sortie de 36 à 48 heures, l’approche est un peu différente. Ton corps n’a probablement jamais vécu 2 couchers de soleil et 2 levers de soleil à la suite, sans dormir entre temps. C’est un bouleversement total. En général, j’essaye de ne lui impose que 2 levers de soleil et 1 seule nuit, donc par exemple je pars à 3-4h le lundi matin, et j’arrive à 20-22h le mardi soir. J’actualiserai cet article lorsque j’aurai fait 48 heures pleines !
Stratégie #2 : dormir 2 à 4 heures
Pour des sorties plus longues, au-delà de 2 jours, on se demande quelle est la meilleure solution : faire une première nuit blanche, puis dormir 5 heures la nuit suivante ? Ou bien dormir 2h30 chaque nuit ?
Personnellement, je préfère dormir soit très longtemps (plus de 5 heures), soit très peu mais régulièrement (moins d’1 heure). Donc dans ce cas, je prendrai plutôt l’option : rouler 36-40 heures puis dormir 5 heures. Je sais que mon corps récupère mieux de cette façon, en dormant plus longtemps, et qu’il sera mieux préparé pour la suite. Cela implique aussi de dormir à des heures inhabituelles, par exemple dans l’après-midi. C’est une stratégie qui me permet d’éviter les grosses chaleurs du milieu de journée, et de profiter de la fraîcheur de la nuit pour rouler.
Mais pour d’autres, dormir à intervalles réguliers est mieux. C’est aussi plus « normal » pour notre corps de dormir 2h30 par nuit, que de dormir 5 heures l’après-midi. Dormir la nuit est probablement mieux en hiver, puisque tu échappes aux températures les plus froides et profites des rayons de soleil en journée. Bref, il n’y a pas de bonne ou de mauvaise solution, seulement une stratégie adaptée à ton corps. Teste-les et vois ce qui marche le mieux pour toi ! 🙂
Le seul soucis de ces « nuits » de 2-3 heures, c’est que l’on se refroidit pour peu de temps et que l’on a quand même du mal à redémarrer (la sensation des genoux rouillés…). Ce n’est pas assez long pour prendre un hôtel, donc tu devras probablement emmener un peu de matériel de camping ; au moins un matelas, pour un peu de confort et pour t’isoler de l’humidité du sol.


Stratégie #3 : faire des micro-sieste (moins d’1 heure)
J’aime beaucoup cette stratégie. On peut soit dormir dès que l’on sent le sommeil arriver, soit planifier ces siestes à intervalles réguliers. C’est une méthode qui trompe le corps en lui faisant croire qu’il a dormi suffisamment, car une micro-sieste de 15 minutes est extrêmement régénératrice. L’idée est de profiter de l’apaisement procuré par le sommeil léger, et de se réveiller avant la phase de sommeil profond.
J’ai testé et elle marche vraiment pour moi, sous forme de 15 minutes de sommeil toutes les 5 ou 6 heures. Le seul bémol, c’est qu’elles te coupent dans ton élan. J’essaye de les caler à un moment où j’avais prévu de m’arrêter, par exemple pour manger un gros repas.
A priori, 10 minutes serait la durée idéale. J’ai déjà entendu des cyclistes parler de micro-siestes de 10 minutes toutes les 2 heures, ça me paraît fou, mais ça a du sens ! Bien sûr il te faudra essayer ce fonctionnement pour voir s’il marche bien sur toi. Ces siestes seraient efficaces jusqu’à 30 minutes. Par contre, il ne faut pas avoir peur de dormir à l’arrache : sur un banc, dans un parc… Et surtout, tu te refroidiras forcément et le réveil sera difficile.
Stratégie #4 : faire une « vraie » nuit (plus de 5 heures)
Le point positif d’une vraie nuit, c’est que ça vaut le coup de prendre un hôtel pour dormir 5 heures (au contraire des nuits de 2-3 heures). Par contre, il est bien plus difficile de sortir d’un lit tout chaud et de repartir, que de se lever d’une sieste sur un banc en métal ahah. Dormir dans un lit, c’est à double tranchant mentalement ; ça fait du bien au oral lorsque l’on arrive, et ça peut être plus difficile lorsque l’on repart !
C’est la méthode qui perturbe le moins le corps, et pour mes plus longs voyages, c’est ce que j’ai fait jusqu’à aujourd’hui. C’est aussi la méthode adaptée au cyclotourisme, au voyage sans objectif de temps.
Conclusion : nuit et sommeil à vélo
N’attends plus, lance-toi. Pars faire une petite sortie de nuit, pour voir le monde comme tu ne l’as jamais vu ! Découvre tes parcours préférés sous un autre « jour » et apprécie le silence et le calme de la nuit. Ce sont vraiment des sorties apaisantes.
Teste ces méthodes de manière intelligente et apprend à connaître ton corps dans l’effort !
Dans le futur j’aimerai tester les micro-siestes sur 1 semaine. Tu peux aussi allier plusieurs stratégies, par exemple faire quelques micro-siestes, puis dormir 2 heures la nuit. Peut-être que c’est ça, le combo gagnant… 😉
Petite astuce : fait tes 2-3 heures de sieste juste avant le lever du soleil. À ton réveil, il fait jour et ton cerveau croira que c’est une nouvelle journée, que tu as dormi la nuit entière et que tu es prêt(e) à repartir ahah.
J’espère que l’article t’aura appris quelque chose, ou qu’il t’aura donné envie de partir cette nuit. 🙂
C’est le deuxième article d’une série axée sur l’ultra-endurance, le premier était sur la préparation physique et mentale et le suivant sera sur la logistique et la nutrition.
À lundi prochain !
Céda
La suite dans ta boîte mail ?
Si ça t’intéresse, j’ai lancé une liste d’emails où je vais plus en détail sur les sujets de mes articles. On y parle entraînement, préparation mentale, dépassement de soi et aventure. C’est la liste pour les vrais de vrais. 😉
Promis pas de spam ahah. Rejoins la famille, le prochain email est lundi !
14 Commentaires
Salut.
J’ai aimé les infos et content de partager (un peu) ta passion.
Alain.
Tes conseils et ton expérience sont très utiles pour des néophites comme moi.
Merci pour ton partage!
Super l’ensemble de tes articles qui sont précieux pour ceux qui veulent se lance et progresser !
Merci encore pour cette mise à disposition de tes expériences.
Merci pour ces conseils, à tester pour la préparation du PBP 2023, et peut-être si cela ce passe bien d’autres expériences d’ultra distance
Merci pour ces récits et conseils.
Je me suis particulièrement intéressé à la partie gestion du sommeil.
J’ai déjà fait 2 fois 25 heures de vélo sans dormir, je sais que ça passe bien.
j’envisage de faire 950 km (moins montagneux que mes parcours précédents) et mettre donc entre 39 et 44 heures, ton retour d’expérience m’est très précieux.
Re-merci.
Bonjour Alain, merci de ton retour !
Tu as l’air d’avoir déjà l’expérience des sorties longues et de nuit, les 36h-48h avec pas ou peu de sommeil devraient se faire sans encombre. Surtout avec moins de dénivelés.
Par contre 950km c’est vraiment top si tu y arrives en moins de 2 jours, chapeau vraiment.
Tiens moi au courant, je serais interéssée d’avoir ton retour ensuite
Merci.
Projet pour début mai si météo clémente.
A bientôt sur ton blog.
Bonjour Cédalise.
Pas de 950 km, l’emploi du temps en a voulu autrement.
675 km avec des cols que j’ai été contraint de couper en 2 car j’ai eu trés froid dans la descente du 2eme col. Il faisait pourtant 8-10° mais bien qu’habitué au vélo en montagne, je n’ai pris ni mes gants, ni ma veste d’hivers. je n’avais qu’un simple coupe vent et j’ai été contraint de trouver un hôtel vers 2h10 pour repartir avec une bonne nuit de 6h00 et finir le jour d’après vers 4h30.
J’avais prévu de découvrir mes sensations avec la fatigue et les cols de montagne et en oubliant les fondamentaux, j’ai juste eu très froid et ça m’a épuisé de passer de 36° max à 6° minimum.
Ca me servira de leçon.
Pour info, mes 2 traces avec récits :
https://www.strava.com/activities/9383690053
https://www.strava.com/activities/9390626194
Merci et à bientôt.
Alain.
Merci pour tous ces bons conseils. En 2021 j’étais sur mon premier ultra à la RAF500 que j’ai bouclé en 38h sans dormir. Je ne pensais pas que je pouvais tenir tout ce temps sans dormir. Cette année je vais doubler la mise avec la RAF1000 et là je vais suivre tes conseils et tester ce qui me conviendra le mieux. Encore merci et j’attends avec impatience tes prochains articles.
Bravo pour la RAF500 en 38h, c’est génial, surtout sans dormir !
La RAF1000 va être incroyable. Si tu as l’occasion de tester avant le départ ce serait idéal, surtout si tu ne comptes pas dormir 🙂
Bonne chance et tiens moi au courant lorsque tu finis !
Je viens de lire votre article sur le sommeil en longues distances à vélo et je vais dans la foulée après m’être inscrit à vos mails d’infos envoyer le lien de l’article à plusieurs copains dont au moins deux sont novices et démarrent en 2022 leurs premiers BRM en vue du PBP 2023.
Félicitations et il toujours interessant de lire et intellectualiser des ressentis ou pratiques pas toujours bien expliqués.
Bonjour Éric, merci beaucoup pour ce retour, je suis vraiment contente de voir que l’article peut aider plein d’autres personnes ! 🙂
Bon courage à tes amis qui se lancent dans la grande aventure du PBP, j’espère y participer un jour aussi !
Article très intéressant, basé sur une longue expérience (ça sent le vécu)
Pouvez-vous me donner l’adresse de votre site (s’il existe) et si vous acceptez que je le cite dans les sites amis dans mon site gegediagonaliste.fr dédié aux longues distances (diagonales, Eurodiagonales, longs brevets) où des thèmes semblables sont évoqués.
Bien que je n’ai jamais pratiqué les ultras, j’ai retrouvé dans votre propos les mêmes principes que j’ai retenu pour gérer mes randonnées nocturnes en longues distances. Je les évoque d’ailleurs avec beaucoup moins de talent que vous sur mon site.
Félicitations, vos propos méritent une très large diffusion auprès des amateurs de longues distances.
Bonjour !
Merci pour ce commentaire très positif, l’adresse de mon site est la suivante : gofargoslow.com
Bien sûr n’hésitez pas à citer mes articles si vous pensez qu’ils peuvent être utiles, au contraire ça me ferait plaisir qu’un maximum de personnes puissent en tirer bénéfice 🙂
Encore merci pour tous ces compliments, et je vais aller faire un tour sur votre site !